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Londres 2012 : Un sprinteur lao aux 100m

Kilakone Siphonexay, 10.73 aux 100 m, sera le seul espoir du Laos
aux Jeux olympiques de Londres 2012.

Le soleil se couche sur le stade délabré de Vientiane mais
Kilakone Siphonexay, l'homme le plus rapide du Laos, ne s'arrête pas.
Allongé sur un banc en bois fait maison, il soulève deux pots de
peinture remplis de ciment, reliés par une barre d'échaffaudage.

"Il n'y pas de salle d'haltérophilie",
justifie le sprinteur amateur avec un sourire généreux en reprenant une
série. Sur ses épaules, et celles de deux camarades, reposent les
espoirs du Laos aux jeux Olympiques de Londres (27 juillet-12 août).

Aux
JO, il y a les nations fortes, celles qui peuvent surprendre, les
faibles et les désespérées. Le Laos fait partie de la dernière
catégorie: il n'a jamais tutoyé un podium.

Rien de surprenant
pour un des plus pauvres pays du monde, embarqué dans la guerre du
Vietnam et son tapis de bombes dans les années 70, puis enfermé par un
régime communiste stalinien qui ne se résout que très timidement à
s'ouvrir depuis les années 90.

A Moscou en 1980, aucun athlète n'a passé le premier tour d'une épreuve. A Londres, l'ambition sera de ne pas finir dernier. "Nous sommes dans le groupe de Brunei ou du Timor-Oriental. Nous sommes un petit pays, admet Kasem Inthara, chef de mission. Si nous pouvons battre un pays aux éliminatoires, ce sera un succès".

Aller
à Londres est déjà une victoire. Aucun athlète n'a conquis sa
qualification par ses performances, mais le pays a bénéficié
d'invitations en athlétisme, natation et taekwondo.

Kilakone, 23
ans, n'a pas réussi les minima (10.24) sur 100 m. Son record personnel,
10.73, est à des années-lumière du record du monde du Jamaïcain Usain Bolt (9.58).

"J'aime m'entraîner dur", dit-il, un maillot d'Arsenal sur le dos – sans doute une copie bon marché. "A Londres, je ferai tout pour battre mon record personnel".

En
formation dans un ministère, il s'entraîne trois heures chaque soir au
stade Chao Anouvong, vieux d'un demi-siècle. Des gamins courent
bruyamment après un ballon devant des panneaux publicitaires en loques.
Et la piste est encombrée d'une foule d'amateurs enthousiastes, malgré
la suffocante moiteur.

"On est plus petits !"

Son travail se limite à des sprints et des accélérations. Un peu de musculation. Pas de programme nutritif. Les athlètes "mangent en famille", répond l'entraîneur Chaleunsouk Aoudomphanh, interloqué par la question. "De la nourriture locale, du riz gluant et des légumes", précise Kilakone.

Chaleunsouk
était lui l'espoir du pays en 2004 à Athènes, malgré un misérable 11.30
sur 100 m dont la simple évocation le laisse désabusé. Il entraîne
aujourd'hui son protégé bénévolement et à mi-temps, tout en gérant une
petite affaire au marché de Vientiane.

"Je prends les entraînements standards et je les modifie un peu" pour les adapter à Kilakone, dit ce diplômé de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF).

Kasem,
le chef de mission, explique les difficultés du Laos à émerger: pas
d'installations, pas d'argent, peu de compétitions, un climat trop
chaud.

Et un problème morphologique insoluble. "Même aux jeux
du Sud-Est asiatique (SEA Games), on ne peut pas gagner de médaille en
natation et en athlétisme, parce qu'en comparaison avec la morphologie
des gens plus talentueux, on est plus petits !"
.

Depuis 1980,
ce responsable a été de toutes les campagnes olympiques du Laos.
Interrogé sur le meilleur moment de l'histoire du sport de son pays, il
sèche: "On veut juste participer, on ne prétend pas à une médaille".

Le
salut aurait pu venir de la pétanque. Le Laos a ramené l'or des SEA
Games, héritage triomphant du temps de la colonie française. Las, la
discipline n'est pas olympique.

Reste Kilakone et ses pots de peinture d'"environ 20 kilos". A côté, un haltère plus lourd, moulé cette fois dans des roues de voiture. "Si seulement on avait un peu plus d'équipements", soupire l'entraîneur.

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